
Delta du Danube
12.06.2014
Encore une fois, nous expérimentons les trains roumains et contrairement à ce que les roumains semblent penser, ils ne sont pas si terribles que ça! Ils ne vont certes pas très vite mais ils sont confortables et à l’heure. Un long trajet aujourd’hui puisque nous devons quitter nos chères montagnes pour nous rapprocher du delta du Danube. Après une escale à Brasov que nous ne voyons malheureusement pas (la ville est censée être très jolie mais nous ne voyons que des grandes barres d’immeubles et un centre de tri postal désaffecté), nous remontons dans le train pour une séance plus musclée :
– Monter les vélos en queue de train contre l’avis de la chef de gare qui est formel : « you cannot go in this train with your bikes »,
– Jouer l’étonnement et l’incompréhension face au jeune contrôleur désemparé (nous n’arrivons pas à savoir si ses calculs alambiqués au résultat très louche sont le fruit de calculs sincères mais erronés ou celui d’une tentative maladroite d’essayer de nous soutirer un petit bakshish pour les vélos),
– Mais le plus difficile reste à venir : Supporter pendant quatre heures le wagon d’écoliers qui reviennent de classe verte… ça crie, ça se bat, ça fait des bêtises et soufflent le plus faux possible dans leur flute à bec… tout ça sous les yeux totalement impassibles et indifférents de leurs professeurs, mais pas des nôtres…
Quand nous arrivons à Galati à 22h45, l’aventure n’est pas terminée. Le chemin pour atteindre l’hôtel que nous avions réservé est parsemé d’embuches : des routes défoncées et mal éclairées, des allées sinistres et désertes, des chiens errants qui nous arrivent dessus par dizaines et pour couronner le tout, le chemin pour atteindre notre hôtel n’est pas praticable et nous oblige à faire un long détour… Bref, nous décidons d’aller côté “centre-ville” et de dormir dans le premier hôtel trouvé. Après encore une vingtaine de chiens errants dans les rues sombres, un type en voiture qui flippe à notre place du danger de notre situation (comprendre : il y a quelques tziganes qui sont dans le coin…), nous sommes finalement secourues par les tziganes en question, qui, dans un anglais parfait, nous indiquent l’hôtel le plus proche, à 200 m à droite : Sport Hotel, pas cher et parfait pour ce soir de coupe du monde. Un repos bien mérité.
13.06.2014
Départ tardif, nous traversons le Danube en ferry puis nous recommençons le vélo de l’autre côté sur le plat relatif du détroit du Danube : certes, il n’y a plus de montagnes mais toujours un bon nombre de montées bien gratinées à 10 % qui sous la chaleur accablante se font bien sentir.
Le soir nous trouvons pour dormir un monastère (Mănăstirea Saon) où les sœurs acceptent de nous accueillir en mettant une petite chambre à notre disposition ; à cause de moustiques, elles n’ont pas voulu que nous campions. Nous comprenons pourquoi à 22h, quand après une longue session de mise à jour des cahiers et de dessin, Claire décide d’ouvrir la porte pour jeter le trop plein d’eau de son gobelet. A peine le temps de l’entrouvrir et de la refermer aussi sec que la porte a déjà laissé passer une nuage incroyable de moustiques! C’est parti pour une demi heure de danse sur les lits pour éliminer tout ce petit monde et pouvoir dormir en paix… Le lendemain, quand nous sortons de la chambre, nous découvrons sur le rebord de la fenêtre et devant la porte un tapis de moustiques morts.
14.06.2014
Nous repartons le lendemain avec près d’un kilo du fromage que les sœurs, qui n’acceptent aucun argent de notre part, nous ont apporté la veille. Nous arrivons à Murighiol vers 16h et plantons notre tente dans le premier camping venu (le seul qui avait un site internet) mais il existe en fait toute une ribambelle de campings dans le village, tous plus petits les uns que les autres. Le village, bien que censé être touristique, laisse une impression étrange de lieu populaire qui a passé son heure de gloire, le centre d’éco-tourisme et les panneaux de projets européens sont rouillés et abandonnés.
Le soir, nous nous prenons un gros orage sur la tête, heureusement avant la tombée de la nuit, car la tente se trouve très vite dans une petite piscine. Nous sortons d’urgence toutes nos affaires et trouvons un nouvel endroit pour planter la tente.
15.06.2014
En se faisant arrêter au bord de la route par un petit couple de papi-mamie qui veulent absolument que nous goutions leur vin, nous rencontrons trois Bulgares qui ont lancé une compagnie de voyage à vélo et font un tour exploratoire pour découvrir de nouveaux itinéraires (http://plateaucycling.com/). Nous faisons le reste de l’étape avec eux. Ils nous expliquent que plusieurs villages du coin sont russophones et qu’ils peuvent donc facilement discuter avec les gens (la langue bulgare et russe étant très proches). Ces communautés russophones orthodoxes “vieux croyants” sont arrivés dans l’actuelle Roumanie aux 18-19ème siècle, fuyant les persécutions des tzars à leur encontre.
A Sarichioi, où nous avions prévu de faire étape, ils s’activent grandement pour nous trouver des gens pour le projet. Mais les propriétaires du camping où nous dormons ont trop fait la fête à un mariage la veille pour accepter de se mettre aux fourneaux et les cuisinières d’à côté sont refroidies dans leur enthousiasme par leur chef qui leur remet les pendules à l’heure. Nous repartirons finalement sans la recette de la soupe de poisson, mais le village, rien que pour son ambiance, vaut le détour : mamies en foulard et longues robes qui viennent nous parler en russe, barques de pêcheurs en bois, une église orthodoxe très rococo tout en dorure et bleu pétant somme toute assez jolie avec le lac bleu azur en arrière plan.
16.06.2014
Redémarrage sur l’eurovélo qui n’existe toujours pas plus qu’avant. A un moment donné, nous entamons un détour pour éviter une grosse route qui ne nous plait pas trop. Après 5 km, le vieux « cocher » d’une charrette nous fait comprendre à coup de grands gestes et mimiques que nous n’allons pas pouvoir continuer par là, le chemin est boueux comme pas possible. Nous venons déjà de passer une dizaine de chiens pas commodes pour arriver jusqu’ici, les recroiser en sens inverse ne nous enchante guère. Le vieux voit notre hésitation, il arrête sa calèche, saute par dessus bord avec…. un fouet à la main et se met à balancer des gros coups face à cette masse de chiens errants. Nous pouvons passer en sécurité. C’est parti pour les 5 km en sens inverse, puis sur un coup de chance, nous découvrons une petite route toute neuve (présente sur aucune carte et aucun GPS) qui longe la grosse route jusqu’au village suivant, nous l’appelons la « piste cyclable OGM » car elles traversent des champs immenses d’agriculture intensive qui sont bien bien loin de la petite agriculture traditionnelle des montagnes de Transylvanie.
Alors que nous cherchons un endroit où dormir le soir, nous découvrons à Istria une jolie maison en rénovation qui porte un panneau « café – tente ». Nous y tentons notre chance et faisons la rencontre de Vasile, un monsieur très sympa et accueillant et qui comprend bien notre projet. Il revient le lendemain avec sa femme Georgeta qui entreprend de nous expliquer, pendant sa pause (elle travaille à l’école primaire), comment préparer la tarte Histriana, spécialité du village. Après une longue discussion, des petits papiers pliés pour nous expliquer comment étaler la pâte, elle décide finalement qu’il serait aussi simple de la cuisiner avec nous et nous invite à venir chez elle après sa journée de travail.
Nous découvrons donc la maison de Vasile et Georgeta, leur grand potager et leurs ruches, discutons de la Roumanie et de l’Union Européenne, des apports de celle-ci (des aides financières pour l’apiculture à partir d’au moins 20 ruches) mais aussi les difficultés que certaines législation européenne entrainent (risque que progressivement certaines traditions ancrées dans la culture roumaine et nécessaires pour combler la faiblesse des salaires deviennent interdites : distiller son propre alcool, avoir des ruches près des habitations, etc).
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